Les pays dits encore de "l’Est" sont encore inconnus et pourtant, ce sont des pays riches culturellement et parfois avec de bons potentiels agricoles. Autre destination de stage agricole à l’étranger, Edouard vous livre ses sentiments...



Hongrie

Mes séjours passés en Hongrie de 1999 à 2005 restent un temps fort de mon expérience agricole et ont suscité bien des questions dans mon esprit.

Depuis leur entrée en Europe, les pays de l’Est ont montré qu’ils avaient une réelle capacité à être des concurrents redoutables. Ainsi, j’ai découvert une agriculture en pleine mutation avec une grande diversité de spécialisation, allant des cultures céréalières, aux bovins en passant par la production de paprika sans oublier le célèbre Tokay. Mais avant de vous livrer mes impressions, il me faut rappeler les fondements de cette agriculture.

Les changements politiques de l’après 1989 ont provoqué des mutations importantes dans le secteur agricole hongrois. La privatisation des grandes fermes étatiques, l’entrée des capitaux étrangers ainsi que l’augmentation du nombre d’exploitations individuelles ont bouleversé le panorama agricole du pays. Il était caractérisé autrefois par l’existence presque exclusive des grandes fermes d’état ou kolkhoz, hautement productives et orientées vers les marchés internationaux. Parallèlement, une agriculture marginale de

subsistance était exercée notamment par les habitants des zones rurales. La production destinée à l’autoconsommation arrivait que très rarement sur les marchés locaux.

De nos jours, il existe en Hongrie deux types d’agriculture et la terre est également répartie entre ces deux grandes tendances. D’une part, les petits propriétaires, environ 1 million détiennent 50 % des terres agricoles. Seuls 10 % d’entre eux sont officiellement reconnus comme agriculteurs. La moitié d’entre eux sont des exploitations individuelles ou familiales dont la taille est de 2,5 ha. La grande majorité des 90 % restant loue leurs terres à des sociétés de production ce qui lui apporte un complément de revenu. Dans cette catégorie, un propriétaire sur 10 se livre à une agriculture traditionnelle d’autoconsommation (légumes et volailles).

L’autre moitié des terres est possédée par de grandes coopératives agricoles et des sociétés anonymes. Ce type d’agriculture se caractérise généralement par des systèmes d’exploitations très intensifs, hautement spécialisés, dont la production est avant toute destinée aux marchés internationaux. Mais ces structures souffrent d’un manque de capitaux qui leur permettrait de moderniser les

infrastructures et le parc de machines agricoles.

Plus de 50 % du territoire est lié à l’activité agricole. On dénombre en Hongrie 200 000 agriculteurs à temps plein mais 30 % de la population active a des rapports avec le secteur agricole, soit par la production pour l’autoconsommation, soit par l’exercice d’une activité agricole à temps partiel.

L’Héritage des Kolkhoz

A l’époque de l’ancien régime politique, une bonne part de la production agricole était assurée par les grandes coopératives d’état (kolkhoz). Avec les changements politiques, la plupart d’entre elles se sont retrouvées dans une situation de non-compétitivité et elles ont fait faillite. Par contre, d’autres ont su s’adapter aux nouvelles conditions politico-économiques. Des terres ont été rachetées selon un étonnant et complexe processus pour ainsi passer des kolkhoz aux sociétés anonymes. Installés dans les anciens bâtiments des kolkhoz, ces

coopératives ont modernisé les structures des exploitations. Il s’agit de sociétés de production agricole, très intensives et très compétitives dont la plupart de la production est destinée aux marchés d’exportation. Mais de gros efforts doivent être réalisés pour la mise aux normes européenne de ces exploitations notamment en matière de qualité environnementale. Ce qui va nécessiter des investissements importants.

Une nouvelle alternative : l’agriculture biologique.

L’agriculture biologique connaît un grand essor en Hongrie depuis l’année 2000 et ce pour diverses raisons :
 L’augmentation de la demande extérieure en produits biologiques ;
 L’appui de l’état au développement de l’agrobiologie ;
 Les changements politiques ont entraîné la perte des marchés traditionnels et le bio représente l’un des rares débouché porteur pour les agriculteurs dont les surfaces ne permettent pas une production intensive rentable.

En Hongrie, la plupart des produits issus de l’agriculture biologique sont donc destinés à l’exportation (soit 95 % et notamment vers les pays de l’Union Européenne comme l’Autriche, l’Allemagne, la Suisse…). La Hongrie compte aujourd’hui une surface totale de 80 000 ha en agrobiologie pour 12000 exploitations.

Cette insertion au plus profond du pays m’a donné une vision très positive du peuple hongrois et de son agriculture. Depuis l’entrée de la Hongrie au sein de l’Union Européenne en date du 1er mai 2004, bien des facteurs militent en sa faveur :
 Un secteur compétitif, notamment en terme de main d’œuvre et de terres ;
 Son potentiel agraire, les conditions géographiques et climatiques sont favorables à la production agricole ;
 L’expertise agraire et la tradition agricole ;
 La charge environnementale inférieure à la moyenne communautaire ;
 Une structure diversifiée (grandes variétés d’espèces et de saveurs) ;
 L’agriculture et l’industrie agroalimentaire représentent 6 % du PIB ;
 L’agriculture contribue au bilan excédentaire du Commerce extérieur.

N’hésitez donc pas à franchir le pas et vous diriger vers ce peuple chaleureux prêt à partager sa culture et son savoir-faire.

Edouard Millier